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vendredi 26 octobre 2012

Saha Aïdkoum



Comme le veut la coutume, après la prière de l'Aïd, on va rendre visite aux voisins et aux proches, nqabalou aâlihoum. Chaque paire de bises quand elle n'est pas multipliée par quatre, nous prend entre quinze et quarante minutes par visite. Il y en a qui vous retiennent  pour vous dire pourquoi, ils ne dorment pas et ne mangent  pas assez, "mghrifa, ma nzidtch".  Aâla biha derti lakhdoud.
 Elle parle, elle se plaint : "Yahasrah aâla zmen". Wach men zmen, ana tani aândi zmen, mais tu n'y étais pas.
Tellement saraâtna, qu'en la quittant, on oublie de lui donner l'assiette de gâteaux qui lui était destinée. On en avait cinq autres à offrir. Heureusement que les autres personnes n'étaient pas aussi bavardes qu'elle! Elle, chkoun ? Bouh, c'est khalti Zhor de l'autre quartier. Chkoun li ma yaârafhach !

On  adore ces visites.


Avant de rendre visite aux proches et leur offrir l'assiette de gâteaux, nous sommes allés au cimetière, nous recueillir sur les tombes de nos chers qui sont parties, Allah irhamhoum.
Qui dit cimetière, dit pleurs. Gare à celles qui ont mis du mascara ! Elles en ressortiraient avec les yeux d'une gazzana qui s'est frottée le visage avec un mouchoir imbibé de qatran !
Quasiment tous les chers disparus de la famille reposent dans le même cimetière côte à côte, où nous nous sommes retrouvés, mes cousines, cousins, cousin par alliance et la grand-tante.
La grand-tante ne peut plus marcher. Comme les allées du cimetière sont impraticables en chaise roulante, il a fallu la porter.
L'un de mes jeunes cousins abbaha, l'a portée sur son dos. Maskin !  Elle l'a roué d'une tapée de tapes sur la tête en lui disant : "Essaraâtni, chaârek msabek bi pomadate essardine.".
Il s'était mis du gel dans les cheveux  Wach il s'était mis ? Faragh kamal el qarâa taâ gel fi chaârou.

On regrette nos chers disparus.
 

On a tous fait la bise à la grande-tante. On a tous eu droit à une remarque de sa part.
A un autre cousin, elle a dit : "Rak bel costume, aâmbalek djit lel hafla taâ
el istiqlal". Parce qu'il portait un costume, une chemise blanche et une cravate rouge.
A une cousine : "Wenti  mazelki maâ laqraya. Habiti tetzewdji maâ ettablo".
 A moi : "Mazal diri khdaymek el taht el taht ?"
Moi el taht el taht ? Jamais ! J'aime travailler en solo sans jamais déranger les autres.

On l'adore, la grande-tante.


En face de là où nous étions, une femme est venue se recueillir sur une tombe envahie par les mauvaises herbes. "Qbar el menssi", a  fait remarquer la cousine, celle qui va épouser ettablo.
La dame portait un hijab noir, des chaussures wahda fiha talon, l'autre ma fihach. Elle a arraché quelques herbes. Six paires d'yeux  ne la quittant pas des yeux. Elle a mis un tapis sur les herbes arrachées. Six paires d'yeux suivant ses mouvements. Elle a enlevé ses chaussures. Six paires d'yeux regardant les chaussettes à rayures rouges et noires. Elle a sorti une bouteille d'eau, un verre et serviette  de son grand sac. Six paires d'yeux attendant la suite... mais la suite ne vint pas.
Comme nous tous, ma grande-tante n'a raté aucun fait et geste de la dame, elle dit : "Djat adir pique-nique, hadi". Elle s'adressa à mon père : " Va lui chercher des merguez, tachwihoum fel chems."
Mon père d'un air sérieux :
- Ya el hadja, ettaqi  moulak.
- Habite tbakamni.
- Lala ya el hadja, mais khali nass tranquille.
- Djak laâqal el youm. Wach men faylassouf mate wa khalalek fhamtou ?
- Ya el hadja, rana fel djabanna.
La grande-tante à ma  mère :
- Wach dertil li moula bitek, ya bent khti. Rahou b'sayadou el youm ?

 Mon père adore ma tante.


La femme d'en face était maintenant bien installée sur son tapis entourée de son sac, sa bouteille et sa serviette.Tout à coup, elle se mit  à pleurer. Etnawah.
Après avoir versé quelques larmes, elle s'arrêta de pleurer. Elle prit un verre d'eau. Elle s'essuya les lèvres et se remit à pleurer.
Un akhina qui passait par là, s'arrêta à sa hauteur et lui  dit :
-  Hram labka aâla mouta, el hadja.
Et ma grande-tante, avocate des nawahate, lui dit :
- Khaliha tebki. Hetta labka habitou tamenaâouh aâlina.
- Allah Yakdik wa Yahdina
Et il continua son chemin.

Ensuite, la tante s'adressant à la pleureuse :
- Bessah nti raki rayha tnawdina el mouta bel bka dialek. Ma taârfich tebki ki nass.
Mon père s'adressant à ma tante :
- Ya el hadja...

Ma tante s'adressant à ma mère :
-  Ahakmi fi radjlek. Il me cherche, il va me trouver.

Ma mère s'adressant à nous tous :
- Khlasset zyara, aya nrouhou

Le cousin aux cheveux gelés à ma tante :
- Viens tata, que je te porte jusqu'à ton fauteuil

 La grande-tante s'adressant au cousin par alliance :
- Erfadni nta, hadak asraâni bel pomadat el badjidj.

Dans la voiture, mon père à ma mère :
- Ta tante...
Ma mère lui coupant la parole :
- Khali ma tante tranquille.

Mon père me regardant dans le rétroviseur :
- Makhlouka, ta portière n'est pas bien fermée

Moi m'adressant à la petite cousine qui est venue avec nous :
- Dee, ferme bien la porte.

La petite cousine à mon père :
- Ca y est, tu peux démarrer maintenant, tonton.

Ma mère à mon père :
- Attends, j'ai oublié de donner l'assiette de gâteaux à ma tante.

Mon père à moi :
- Va lui donner son assiette de gâteaux, à el hadja.

Moi à ma grande-tante :
-  Tata, voici ta part de gâteaux.

La grande-tante au cousin  par alliance qui peinait à lui attacher la ceinture de sécurité de la voiture :
- Aâmbalhoum, rani nessana ghir fel gato taâhoum.

Le cousin par alliance s'adressant à moi :
- Au revoir Makhlouka, on s'appelle.

Moi pensant :
- Depuis quand on s'appelle ?!  Djdida hadi !

Ma mère à moi :
- Wach qalatlek ?

Mon père à ma mère :
- Que veux-tu qu'elle lui dise ?

Ma mère à la petite cousine :
-Tu veux un gâteau, pupuce ?

Et mon père qui regarde ma mère de travers
Et ma mère qui sourit en l'ignorant.

Et moi  me demandant :
- Pourquoi ma mère a donné un gâteau à la pupuce Dee sachant pertinemment que mon père a horreur que l'on mange dans sa voiture !

J'adore ma famille.








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