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dimanche 12 février 2012

Voir une femme se faire battre dans la rue




J'ai une copine qui passe souvent au travail me prendre en voiture, sa voiture sent le kafour mais maâlich, c'est gentil de sa part, cela m'évite le bus à l'heure de pointe et les reproches de mon père qui à chaque fois qu'il vient me chercher au travail, il me reproche de ne pas avoir mon permis. Je le comprends un peu, cela lui fait un détour, mais c'est lui qui insiste pour venir me chercher, je lui dis que je me débrouille pour rentrer, je ne suis pas une gosse, il me me répond qu'il préfère le faire et affronter la circulation que d'écouter mes plaintes sur les transports tous les soirs, parce que cela l'empêche d'écouter les informations à la télé.
Je ne comprends pas, chaque fois qu'il regarde le journal télévisé, il s'énerve et dit que regarder le JT, c'est comme écouter le prêche d'un imam qui a perdu la mémoire.

Sur notre chemin pour aller à la maison, ma copine s'est arrêtée trois fois. La première fois, pour acheter un dissolvant sinon elle pourrait pas faire sa prière avec le vernis qu'elle s'est éclaboussée sur les ongles. La seconde fois,  pour passer récupérer son séchoir chez une copine. Et la troisième fois... eh bien elle s'est arrêtée - pour rien - chez le libraire, parce qu'elle ne se souvenait pas du titre de l'ouvrage qu'elle devait commander. Le libraire lui a dit qu'elle lisait beaucoup, c'est pour cela que sa mémoire ne retient plus rien. Cela a fait rire ma copine. Si le libraire m'avait fait cette remarque, je n'aurais pas ri, je lui aurais répondu avec des mots que sa mémoire, à lui, n'oublierait pas.

Après ces arrêts et le cassement de tête pour trouver un parking, nous sommes enfin sur le chemin qui mène à la maison. J'avais hâte de rentrer. J'étais fatiguée et l'odeur du camphre me donnait la nausée. Je n'ai pas voulu le dire à ma copine pour ne pas la froisser, parce qu'une fois, une autre copine lui avait fait la remarque sur l'odeur du kafour, elle lui a répondu que si l'odeur la gênait, elle n'avait qu'à prendre un taxi qui sent laghmel ou le bus qui sent qroussette laâtarresse et les chaussettes pas lavées.

A part l'odeur du camphre et les coups de frein violents, le trajet s'est bien passé. Il y avait de la bonne musique qu'on n'écoutait pas parce que nous discutions du travail et de la prochaine sortie avec le groupe.
Tout allait bien, on approchait de la maison. Ma copine n'habite pas loin de chez moi.
Mais voilà que... avant de prendre le carrefour, sur le trottoir à gauche, on voit un homme en train de donner des coups sur  la tête d'une femme ! Ma copine ne pouvait pas s'arrêter tout de suite. Il n'y' avait pas de place pour garer. Elle crie à un homme moustachu, qui était adossé à un arbre plus frêle que lui, d'aller secourir la femme qui se faisait tabasser à quelques pas de là où il était. Il lui répond qu'il l'avait vue et qu'il a essayé de l'aider, que l'homme lui avait dit de ne pas se mêler car c'était sa femme, et que lui, l'homme adossé à l'arbre, ne se mêlait pas des affaires de couples.
Notre sang, à ma copine et à moi, et les roues de la voiture n'ont fait qu'un tour. Ma copine a arrêté brusquement la voiture sur le trottoir, et nous sommes descendues.
Nous sommes d'abord passées dire à l'homme adossé à l'arbre ce que nous pensions de sa passivité devant une femme qui se faisait tabasser et de ses chlagheme que ma copine lui a conseillé de raser car il ne les méritait pas, ensuite nous sommes allées secourir la pauvre femme.

L'homme était toujours en train de frapper la femme sur la tête.  Il lui disait : "Khoudi ya bent el kelb". Il la bousculait. Elle, elle cachait son visage, on ne l'entendait pas pleurer.
J'ai dit à l'homme que c'était a'ib aâlih de frapper une femme sans défense et en plus dans la rue, Il m'a répondu de me mêler de mes affaires et de continuer mon chemin, et que c'était sa femme, qu'il la frapperait  là où il voulait et cela ne regardait personne.
Il avait des dents qui faisaient peur et pas brossées, on voyait quelques restes d'orange sur la gencive inférieure et entre ses dents jaunies.
Ma copine, elle, elle n'a pas pris de gant, elle s'est adressée à lui  par des mots commençant par un "T" et un "Ch" en lui faisant remarquer que même si c'était sa femme, il n'avait pas le droit de la frapper. Bien sûr, l'homme a sorti tout le vocabulaire grossier qu'il connaissait et nous a menacées de nous frapper aussi.

Pendant que ma copine et le mari violent échangeaient leur liste de noms d'oiseaux, j'essayais de parler à la femme qui protégeait toujours son visage avec les mains comme si elle s'était résignée à recevoir des coups. Elle ne voulait pas me répondre craignant peut-être la réaction de son mari.
Autour de nous, une petite foule s'est formée, qui nous regardait sans intervenir, comme si c'était un spectacle de rue, il y en avait qui riaient.Ysawad saâd'houm !

En voyant, ce petit attroupement, deux policiers sont arrivés. Où étaient-ils quand la femme se faisait tabasser ! Ils ont voulu savoir ce qui se passait.
Après nous avoir écouté et écouté le mari violent qui leur a dit qu'il ne frappait pas sa femme, mais la bousculait bark, el kadab, les policiers ont interrogé la femme qui a approuvé avec des yeux terrifiés le mensonge de son mari.
Les policiers ont dit à l'homme de prendre sa femme et de rentrer chez lui et que la prochaine fois il réglerait ses problèmes de famille à la maison, pas dans la rue.
L'homme a pris violemment sa femme par le bras et ils sont partis.
Les policiers ont dispersé la foule. Ensuite, il nous ont demandé si la voiture qui était garée sur le trottoir était à nous, ma copine a répondu, avec la rage dans la voix, que c'était bien la sienne. L'un des policiers lui a dit que si elle ne voulait pas avoir de contravention, elle avait intérêt à la déplacer et rentrer chez elle.
Nous sommes parties sans discuter avec les policiers parce que leurs regards étaient menaçants.

Quand je suis rentrée chez moi, dès que mon père a vu la tête que je faisais, il m'a demandé : "Wach sralek tani elyoum ?". Je n'avais pas envie de parler de ce qui s'était passé. Je lui ai dit que l'on avait  eu une crevaison en route. Il rétorque : "Et bien sûr, ta copine n'avait pas de roue de secours ! ".
J'aime bien quand mon père me taquine, mais ce jour-là le cœur n'y était pas, parce que j'avais encore dans ma tête  l'image de la femme et son regard craintif pendant elle répondait aux policiers.

Makhlouqiate
Le 6 juin 2011

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